L’UNIC, branche éducation Routière de la FNAA, communique…

Projet de Loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, dit « Macron » :

où en est-on vraiment et en vérité ?

 

Au lieu de crier victoire comme certains l’ont fait précipitamment alors même que la procédure législative n’était pas encore allée à son terme à l’Assemblée Nationale (le texte a été adopté ce jeudi 18 juin 2015 en fin d’après-midi suite au rejet de la motion de censure), l’UNIC a pris le parti du sérieux de l’analyse et du décryptage objectif du texte tel qu’il repart maintenant pour une deuxième lecture au Sénat.

Nous pouvons maintenant vous communiquer notre position.

Nos conclusions sont beaucoup moins optimistes que celles de ceux qui disent avoir obtenus quelque chose de bon. La réalité est que, dans leurs présentations, les dispositions législatives de ce texte Macron réformant l’apprentissage à la conduite, son cadrage et son aboutissement au travers du permis de conduire, paraissent moins brutales. Mais au fond, elles sont tout aussi invariablement déterminées dans leur objectif de dérégulation. Sous couvert d’une présentation marketing laissant croire qu’elle modernise l’enseignement à la conduite, le projet de Loi Macron continue en réalité de tenter d’imposer une dérégulation de la chaine de l’apprentissage à la conduite qui la fragilisera dans son ensemble, à commencer par les écoles de conduite, leurs patrons comme leurs salariés. Et au final, sans chercher à faire mieux pour la sécurité routière, absente de ce texte.

En voici les preuves…

POUVONS-NOUS CONSIDÉRER AVOIR OBTENU LE MAINTIEN DU LOCAL ?

NON !

Ce que dit le texte de Loi…

« Article 8 quinquies

Le premier alinéa de l’article L. 213-2 du code de la route est ainsi modifié :

1° À la première phrase, après le mot : « écrit », sont insérés les mots : « , qui peut être conclu dans l’établissement ou à distance, dans le respect de la section 2 du chapitre Ier du titre II du livre Ier du code de la consommation, » ;

2° Après la première phrase, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Ce contrat est conclu après une évaluation préalable du candidat dans le véhicule ou dans les locaux de l’établissement. »

L’avis de l’UNIC

Dans la mesure où il existe dans cette formulation du texte de loi une possibilité d’inscription en ligne sans contrepartie d’obligation de local pour l’établissement délivrant la formation, et une alternative entre une évaluation dans le véhicule ou bien dans le local, avoir un local n’est donc plus une condition obligatoire pour pouvoir exercer l’apprentissage à la conduite. Cela laisse la porte ouverte aux établissements d’enseignement à la conduite ne disposant pas de locaux physiques.

Si le texte ne dit plus explicitement que le local est supprimé, il ne renforce pas pour autant son obligation. Ce qui est grave car, cette disposition relevant du « réglementaire » et non du « législatif », un simple arrêté pourra tout modifier, sans concertation. C’est pourquoi nous avons proposé un amendement en ce sens, porté par des députés mais systématiquement refusé par la commission spéciale, le rapporteur ou le gouvernement.

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A-T-ON REPOUSSÉ LA LÉGALISATION DES AUTO-ÉCOLES EN LIGNE ?

NON !

Ce que dit le texte de Loi…

« Article 8 octies

Dans un délai de deux mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport présentant les modifications apportées à la composition du Conseil supérieur de l’éducation routière, en prévoyant notamment la participation de parlementaires, de représentants de l’apprentissage de la route en ligne et d’organisations syndicales, et à ses missions, en lui confiant également le suivi, l’observation et l’évaluation statistique des conditions d’accès au permis de conduire sur l’ensemble du territoire national. »

L’avis de l’UNIC

Il est inacceptable que de soit disant représentants de l’apprentissage de la route en ligne soient intégrés dans le CSER sans qu’ils soient comme nous tous soumis aux lois et réglementations en vigueur de la représentation professionnelle. Les « auto-écoles en ligne », sous réserve qu’elles soient reconnues légalement et qu’elles aient accès à l’agrément, pourront alors entrer librement et selon leur choix dans les syndicats existant pour faire porter leurs voix, comme toute auto-école. Le fait d’être dite « en ligne » ne doit aucunement leur conférer un statut dérogatoire aux règles légales de la représentation professionnelle. Si tel était le cas, nous y verrions un déni de la représentation syndicale qui doit, elle, et dans sa diversité, se présenter aux suffrages de leurs pairs. Si cette disposition devait se retrouver dans le texte final de la Loi, l’UNIC entreprendra toutes démarches juridiques utiles pour supprimer cette disposition inique.

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A-T-ON ÉVITÉ L’ÉMERGENCE DE NOUVELLES FORMES D’ENSEIGNEMENT À LA CONDUITE PRÉCARISANT LA PROFESSION ?

NON !

Ce que dit le texte de Loi…

« Article 9 L. 211-4 : Conduite supervisé des 18 et plus

Tout élève âgé d’au moins dix-huit ans inscrit pour suivre une formation à la conduite des véhicules légers peut suivre un apprentissage en conduite supervisée, sous la surveillance constante et directe d’un accompagnateur, après validation de sa formation initiale par l’enseignant de conduite. Cet apprentissage n’est soumis à aucune condition de distance ou de durée minimales.

L’avis de l’UNIC

Pourquoi les mots « par un enseignant de la conduite » sont-ils retirés du texte final ? Pour faciliter la dérégulation et donc favoriser de nouveaux modes d’enseignement qui trouvent grâce aux yeux du Gouvernement parce qu’ils seraient officiellement réputés « gratuits » (ce qui devrait alors être traduit dans la Loi, comme nous l’avons suggéré par une proposition d’amendement,  par l’introduction du mot « bénévole » à côté du mot « enseignant » afin d’éviter les dérives de travail dissimulé) et ne se préoccupent pas d’abord du résultat au regard de la sécurité routière mais bien du coût du permis de conduire.

Ce que dit le texte de Loi…

« Article 9 L. 211-6. Conduite libre

Sauf dans les périodes de conduite accompagnée définies aux articles L. 211-3 à L. 211-5, l’apprentissage de la conduite des véhicules légers sur la voie publique peut être effectué sur un véhicule répondant à des prescriptions particulières, avec un accompagnateur justifiant d’une condition d’ancienneté du permis de conduire précisée par le décret mentionné à l’article L. 211-8.

L’avis de l’UNIC

C’est la prime aux dérives et abus, avec la suppression de l’obligation de formation pour les accompagnateurs dans le cadre de la location de voitures doubles-commandes. Permis Malin, pour ne pas le citer, a gagné !

Ce que dit le texte de Loi…

« Article 9 bis L. 213-4-1

La répartition des places d’examen au permis de conduire attribuées aux établissements d’enseignement de la conduite et de la sécurité routière est assurée dans des conditions objectives, transparentes et non discriminatoires, ne portant pas atteinte à la concurrence entre ces établissements. Ces places sont attribuées aux établissements d’enseignement de la conduite et de la sécurité routière en fonction notamment du nombre d’enseignants  à la conduite dont ils disposent, et de manière à garantir l’accès des candidats libres à une place d’examen.

« La méthode nationale de répartition ainsi que les pièces nécessaires à l’inscription à une session d’examen du permis de conduire sont définies par arrêté du ministre chargé de la sécurité routière. »

L’avis de l’UNIC

La formulation est une nouvelle fois dangereuse par son imprécision. Nous avions demandé, par des propositions d’amendement, que soit précisée la nature de l’enseignement à la conduite par une apposition du mot «  salariés » au mot « enseignants », pour éviter que ne soit encouragé l’auto-entreprenariat avec la précarisation et les possibilités de triches facilitées qui vont avec, au détriment d’un renforcement du statut de salariat qui est plus sûr pour tous.

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À TOUT CECI S’AJOUTENT D’AUTRES DISPOSITIONS INAPPROPRIÉES VOIRE INCONSÉQUENTES…

Ce que dit le texte de Loi…

« Article 8 quater Suppression de l’avis de la commission pour l’agrément des auto-écoles

Le code de la route est ainsi modifié :

1° À la fin des premier et dernier alinéas de l’article L. 213-1, les mots : « , après avis d’une commission » sont supprimés ;

2° Au deuxième alinéa de l’article L. 213-5, les mots : « et recueilli l’avis de la commission mentionnée à l’article L. 213-1 » sont supprimés. »

L’avis de l’UNIC

Vous le comprenez l’ouverture d’une école de conduite ne sera plus soumis à l’avis de la CDSR. Comment la profession pourra-t-elle donner son avis  au Préfet ? Pourquoi une fois encore mettre dans la Loi des dispositions nous écartant ?

Ce que dit le texte de Loi…

« Article 8 sexies Condition d’ancienneté du permis de conduire pour l’exploitant

Au 3° de l’article L. 213-3 du code de la route, les mots : « , d’ancienneté du permis de conduire » sont supprimés. »

L’avis de l’UNIC

Selon cette disposition, être exploitant d’un établissement de formation à la conduite ne serait plus conditionné à quelque expérience en matière de conduite. On voit bien l’objectif recherché : ouvrir la porte à des sociétés avec de nouveaux modèles économiques, qui proposeront une offre à l’apprentissage à la conduite répondant d’abord aux exigences du marché et aux volontés du consommateur, qui seront « hors-sol  et hors sujet » par rapport à la nature même de ce qui est le cœur de notre métier : la sécurité routière.

Ce que dit le texte de Loi…

« Article 9 – Article I et I bis non modifiés

L’accès aux épreuves théoriques et pratiques du permis de conduire est un service universel. Tout candidat se présentant librement ou par l’intermédiaire d’un établissement ou d’une association agréé au titre des articles L. 213-1 ou L. 213-7, et ayant déposé une demande de permis de conduire se voit proposer une place d’examen, sous réserve d’avoir atteint le niveau requis. »

L’avis de l’UNIC

« On va bien rire ! » pourrait-on dire si on avait encore un peu d’humour… Comment fera l’administration face à un afflux probable de candidats libres ? De plus, qui va vérifier que le niveau requis est atteint ? Le défaut de privatisation des examens pratique risque d’entrainer l’échec de cette mesure. Un premier pas vers une privatisation ?

À mettre en perspective de notre proposition rejetée d’amendement à l’article 9 alinéa 4 : « Confier l’épreuve pratique du permis B à des organismes certificateurs agréés permettra de réduire fortement les délais d’attente, notamment entre un premier et un deuxième passage ».

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EN CONCLUSION

Crier victoire sur ce qu’est le texte du Projet de Loi Macron aujourd’hui serait signe d’aveuglement ou de complicité.

Par respect pour la profession, pour toutes les écoles de conduite de France, l’UNIC refuse de cautionner sous une forme ou une autre ces déclarations qui paraissent être plus inspirées par une recherche de postures politiciennes que par le rôle qui incombe à des responsables syndicaux.

Si le combat mené à l’origine de cette démarche gouvernementale par toutes les représentations professionnelles a bien été réel, ayant permis de battre en brèche des tentatives d’écrasement de la profession, il ne faut pas se leurrer.

La « mort » n’est pas que « violente » : elle peut aussi être « douce ».

C’est ce qui découle du texte actuel du projet de Loi Macron en l’état, sur lequel le Gouvernement a engagé sa responsabilité en application de l’article 49-3 de la Constitution.

L’UNIC appelle donc à la mobilisation et la vigilance générale de toutes les écoles de conduite.

Elle appelle les sénateurs à réagir et prendre en compte les risques que comporte ce projet Loi encore imparfait sur le volet « Éducation routière ».

Ses évolutions sémantiques et techniques ont fait croire qu’elle reviendrait à des intentions plus « modernisantes ». Faux ! Elle reste une Loi déstabilisante, dangereuse pour la profession, et surtout pour les futurs apprentis-conducteurs et la Sécurité Routière mise à mal.

L’UNIC vous informera des actions qu’elle envisage pour l’avenir proche. Restons lucides et objectifs, libres et indépendants, déterminés et mobilisés !

UNIC, voir loin, parler franc, agir ferme.

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